Une nouvelle fois les enfants des ateliers et leurs parents nous ont ravis avec un spectacle de qualité à la MJC Montchapet le 1er février 2025.
Le public, nombreux, a apprécié les acteurs et un magnifique décor.
Une nouvelle fois les enfants des ateliers et leurs parents nous ont ravis avec un spectacle de qualité à la MJC Montchapet le 1er février 2025.
Le public, nombreux, a apprécié les acteurs et un magnifique décor.
A la découverte d'une célèbre inconnue
Pour la Journée internationale des Droits de la Femme, Bourgogne-Eurcasie a proposé des lectures d'Elsa TRIOLET, une russe qui écrit en français : résistante, écrivaine, traductrice ...
Qui fut Elsa Triolet ? Auteur d'une oeuvre considérable, elle publia 27 livres et devint la 1ère femme à obtenir le prix Goncourt (1945). Elle participa à la Résistance et fut une grande intellectuelle de l'après-guerre.
Epouse de Louis Aragon, elle trouva difficilement sa place dans notre littérature et avec lui publia un monument "les oeuvres croisées". Traductrice, elle traduisit Maiakovski, Tchékhov, mais aussi Aragon, André Gide en russe.
A l'occasion du centenaire de la Révolution d'Octobre 1917, Bourgogne-Eurcasie a organisé la projection du film "Octobre" de Sergueï Eisenstein.
A l'issue du film Jean Vigreux, professeur d'histoire contemporaine à l'Université de Bourgogne, a apporté son éclairage tant sur le film que sur les faits historiques.
Extraits de la conférence de Madame Irène Soologorsky :
Elle a d’abord rappelé que la Russie du 18ème avait surtout une tradition orale et que, grâce à Pierre le Grand, elle s’était ouverte sur l’Europe. Elle est devenue ensuite très francophile.
En réaction à l’invasion de Napoléon en 1812, Pouchkine donna naissance à la littérature russe, suivi ensuite par les courants du 19ème siècle : le roman russe avec Tolstoï et Dostoievsky, puis le fantastique avec Gogol. Le début du 20ème siècle fut un éblouissement culturel en Russie dans tous les domaines ; les années 20 virent apparaître Tsvetaieva et Maïakovski.
Après la révolution russe, la littérature soviétique prit son essor avec un formidable développement de l’édition et de la traduction. Hors des écrivains officiels s’est alors développé l’art de l’allusion chez de nombreux auteurs (Victor Nekrassov : Les tranchées de Stalingrad) qui permit dans la société la naissance de la perestroïka. Mais un certain nombre d’écrivains quittent l’URSS ou sont contraints de s’exiler.
A l’arrivée de Gorbatchev, les écrivains abandonnent les schémas officiels et abordent de nouveaux thèmes : Raspoutine (1984 L’incendie), Aïtmatov (Les rêves de la louve, tirés à plus de 50 millions d’exemplaires), Astafiev. La poésie a aussi ses grands maîtres : Voznessenski, Vyssotski, Harms. C’est une période de découverte des auteurs étrangers et russes exilés (Soljenitsyne). Les revues tirent à des millions d’exemplaires.
Après la chute de l’URSS (1991) ce sont les ténèbres de la littérature. Des revues passent de 20 millions d’exemplaires à 2 000. Il faudra attendre la fin des années 90 pour qu’apparaisse une nouvelle littérature avec le roman policier (Boris Akounine, Alexandra Marinina) qui réveille le goût de la littérature. Puis arrivent une littérature noire (Kalidine : Triste cimetière) et une littérature du sexe (Narbikova).
On assiste alors au sauvetage de la littérature russe grâce à l’appui des oligarques et des banques avec la création de prix littéraires : le prix Booker en 1992, le prix Triomphe (fondé par Bérézovsky) qui récompense l’ensemble d’une œuvre, puis le prix Début (pour les jeunes écrivains).
Une nouvelle littérature naît, diverse :
dans la Russie avec des centres littéraires différents (Moscou, Saint-Pétersbourg, Oural, Oufa, …),
dans le monde avec des écrivains dispersés (Israël …),
différentes générations (Aïtmatov : Tuer ou ne pas tuer ; Daniel Granine).
Les thèmes sont variés selon les auteurs : Oulitskaïa (Sonetchka), Prilepine (Pathologies), Kourkov (Le pingouin), Popov (Danser jusqu’à la mort), Guérassimov (La soif), Igor Saveliev (La ville blême), Makanine, …
Ils refusent de diffuser des valeurs modèles, mais souhaitent appréhender la réalité à partir de la fiction et l’imaginaire. Les tirages sont souvent limités, mais de nombreux écrivains sont nés.
Il faut lire cette littérature si on veut comprendre la Russie. C’est la meilleure porte pour comprendre les Russes.
NB. Vous trouverez d’utiles références et une bibliographie sur le site des « Lettres russes »
http://sokolo.lrs.free.fr
Le 3 février 2011, Bourgogne-Eurcasie accueillait à Dijon 4 jeunes écrivains russes, lauréats du Prix Début. Ils étaient accompagnés d'Olga Slavnikova, écrivain ("L'immortel", "2017") et directrice du prix.
Ces 4 jeunes, Alissa Ganieva ("Salam, Dalgat!") Mikhail Enotov ("La petite boîte avec un panorama de Varsovie") Igor Savelev ("Les Russes à la conquête de Mars") et Anna Lavrinenko ("L'enfant perdu") ont dialogué toute la journée avec les étudiants de l'Université, les élèves du lycée Charles de Gaulle et le public à la librairie Chapitre. Ils nous ont décrit leur univers de jeune écrivain, leurs attentes, les espoirs de la jeunesse russe actuelle et répondu aux nombreuses questions de l'auditoire.
Leurs écrits traduits en français sont publiés dans un recueil "Ecrire la vie", éditions Glas, Moscou. On peut aussi les retrouver sur le site : www.pokolenie-debut.ru avec d'autres auteurs.
Quelques textes récités par les élèves des cours de russe de l'association
Aнна AХМАТОВА
1889 - I966.
C’est une des plus importantes poétesses russes du XXe siècle. Ses disciples l’appellent ’ Reine
de la Néva ‘ ou ‘ Ame de l’âge d’argent’.
Les thèmes récurrents de son œuvre sont :
-Le temps QUI PASSE;
- Les souvenirs.
- Le destin de la femme créatrice.
- Les difficultés pour vivre et écrire.
- Dans l’ombre du Stalinisme.
Le poème que je vais vous
réciter ce soir a pour titre:
‘
PETROGRAD’ 1919.
Il fait partie d’une série de
poèmes écrits durant la période stalinienne ’ Les années noires’
Celui-ci, d’une manière
extrêmement réaliste, dans un style où les mots résonnent avec force, décrit
les moments douloureux vécus à cette époque
Anna Akhmatova est une
icône de la souffrance russe.
En voici quelques extraits:
Петроград 1919
И мы забыли навсегда,
Заключены в столгце дикой,
Озера, степи , города
И зори родины великой.
В кругу кровавом день и ночь
Томит жестокая истома…
Никто нам не хотел помочь
За то, что мы остались дома,
За то, что
город свой любя
А не крылатую свободу,
Мы сохранили для себя
Его дворцы, огонь и воду.
Иная близится пора,
Уж ветер смерти серце студит,
Но нам священный град Петра
Невольным памят ником, будет.
Никто ничего не отнял!
Никто ничего не отнял!
Мне сладостно, что мы врозь.
Целую Вас — через сотни
Разъединяющих вёрст.
Я знаю, наш дар — неравен,
Мой голос впервые — тих.
Что вам, молодой Державин,
Мой невоспитанный стих!
На страшный полёт крещу Вас:
Лети, молодой орёл!
Ты солнце стерпел, не щурясь,
Юный ли взгляд мой тяжёл?
Нежней и бесповоротней
Никто не глядел Вам вслед...
Целую Вас — через сотни
Разъединяющих лет.
12 февраля 1916
Personne ne nous a rien ôté !
Personne ne nous
a rien ôté –
Elle m’est douce,
notre séparation !
Je vous embrasse,
sans compter
Les kilomètres
qui nous espacent.
Je sais :
notre art est différent.
Comme jamais ma
voix rend un son doux.
Jeune Derjavine,
que peut vous faire
Mon vers brutal
et ses à-coups !
Pour un terrible
vol je vous
Baptise :
envole-toi donc, jeune aigle.
Tu fixes le
soleil, l’œil ouvert, –
Est-ce mon regard
trop jeune qui t’aveugle ?
Plus tendrement
et sans retour
Nul regard n’a
suivi votre trace.
Je vous embrasse,
– sans compter
Les kilomètres
qui nous espacent.
12 février 1916
Oсип МАНДЕЛЬШТАМ
1892 - 1938
Я пыю за военные астры, за все, чем корили меня
За барскую шубу, за астму, за желчь петербургсково дня,
За музыку сосен савойских, Полей Елисейских бензин,
За розы в кабине ролс ‑ ройса, за масло парижских картин.
Я пыю за бискайские волны, за саивок альпийских кувшин,
За рыжую спесь англичанок и дальних колоний хинин,
Я пыю, но еще не придумал из двух выбираю одно‑
Душистое асти‑спумаите иль папского замка вино.
Je bois à la Guerre et à ses
bouquets d’aster, à tout ce dont il m’est fait reproche :
Au manteau de fourrure du
noble, à l’asthme, au jour bilieux sur Petersbourg,
A la musique des pins de
Savoie, à l’essence des Champs Elyséens,
Aux roses à l’arrière des
Rolls-Royce, à l’huile des peintres de Paris.
Je bois aux vagues du Golfe
de Gascogne, à la crème des cruches sur l’alpage
Au port altier de rubicondes
anglaises et à la quinine des lointaines colonies,
Je bois, mais ne me suis
point encore résolu : des deux lequel choisir ?
Du joyeux Asti-Spumante ou du vin des castels papaux…
11 Апреля 1931 Joseph Mandelstam 11 Avril 1931
За гремучую
доблесть грядущих веков,
За высокое племя
людей
Я лишился и чаши
на пире отцов,
И веселья, и
чести своей.
Мне на плечи
кидается век‑волкодав,
Но не волк я по
крови своей,
Запихай меня
лучше, как шапку, в рукав
Жаркой шубы
сибирских степей,
Чтоб не видет ни
труса, ни хлипкой грязцы,
Ни кровавих
костей в колесе,
Чтоб сияли всю
ночь голубые песцы
Мне в своей
первобытной красе,
Уведи меня в
ночь, где течет Енисей,
И сосна до звезды
достает,
Потому что не
волк я по крови своей,
И меня только
равный увьет.
17-28 марта 1931
Pour
la gloire à venir, la gloire héréditaire,
La
haute lignée des humains,
J’ai
perdu ma coupe à la table des pères,
La
gaieté, la joie, tout enfin...
Le
siècle, loup-cervier, bondit sur mes épaules.....
O
siècle, je ne suis point loup et je t’en prie,
Comme on fourre un bonnet
dans une manche molle,
Mets-moi
sous ta pelisse au chaud en Sibérie.
Cache
à mes yeux la boue aux lâchetés cruelles,
Ainsi
que cette roue aux sanglants ossements,
Pour
que je voie, en leur splendeur originelle,
Les
chiens bleus consteller l’immense firmament.
Emporte-moi
là-bas où coule l’Iénisséi,
Où
vers l’étoile d’or un haut sapin s’allonge,
Car
je n’ai pas la peau d’un loup et je ne sais
Sans
déformer ma bouche énoncer des mensonges.
Joseph
Mandelstam
17-28 mars 1931
Durant
quelques décennies à la charnière du XIX
et du XX siècles, la vie culturelle russe connut une remarquable
renaissance artistique, y compris dans le domaine de la littérature.
Le pays s’ouvrait à l’Occident. La vie
artistique russe adaptait l’Art Nouveau à ses exigences propres, ce qui
entraînait des recherches sans précédent sur des modes d’expression dans
différentes sphères de la culture nationale.
Cette période éblouissante se nomme
« l’Age d’argent » en référence à « l’Age d’or » de la
Russie littéraire de Pouchkine et de Gogol.
La couleur argent se réfère également au
scintillement de la lune, symbole de la décadence, de la déchéance, du
pressentiment d’une catastrophe. L’Age d’argent de la Russie est né au
crépuscule de l’ordre impérial. Il a coïncidé avec des bouleversements majeurs,
sociaux et politiques en Russie et dans le monde. Les artistes et les
intellectuels répondirent à ces événements, explorant les concepts de violence,
de déni et de vision utopique. Certains, comme le poète Alexandre Blok, le
compositeur Skriabine et le peintre Vroubel sacrifièrent leurs forces sur
l’autel des rêves esthétiques ; d’autres, comme le danseur Nijinski et
l’architecte Chekhtel créèrent de nouveaux systèmes artistiques, tandis que
d’autres encore comme le poète Maïakovski et le photographe et designer
Rodchenko, mirent leurs talents au service de la doctrine politique.
Nombre des créateurs associés à cette
période ont connu une renommée internationale : Marc Chagall, Fédor
Chaliapine, Anton Tchékhov, Serge Diaghilev, Carl Fabergé, Vassily
Kandinsky, Kasimir Malevitch, Konstantin
Stanislavski, Igor Stravinsky.
L'Âge d'Argent (1890-1930)
Le symbolisme fut le ferment philosophique
et esthétique qui permit l’essor de l’Age
d’argent russe. Ses valeurs – le refus du monde des apparences, la
recherche d’une forme artistique idéale, l’exaltation du monde intérieur – ont
laissé une empreinte profonde sur tous les genres de littérature russe du XX
siècle.
La poésie russe connut à cette époque un
épanouissement formidable avec l’apparition de nombreux mouvements, groupes et
écoles poético-philosophiques, tels que symboliste, acméiste, imaginiste,
futuriste, qui cherchaient à ranimer et à enrichir la langue poétique russe en
innovant ses formes, ses rythmes, ses couleurs
et son vocabulaire.
Mais les meilleurs poètes de cette période,
comme Alexandre Blok, Anna Akhmatova, Boris Pasternak, Ossip Mandelstam et
beaucoup d’autres, surpassaient les cadres restrictifs des théories et des
doctrines de groupes, en nous laissant des chefs-d’œuvre impérissables qui
continuent à illuminer le Parnasse russe de leur délicate et spirituelle
lumière argentée.
Natacha
Armand